A l'heure où l'extrême-droite se banalise dans notre pays, il paraît intéressant de mettre à la disposition de tous des cartes illustrant la présence, l'origine et la répartition des étrangers en France. Allez ! un peu de datajournalisme....
La présence étrangère en France fait actuellement l'objet de discours populistes et d'amalgames en tous genres, une dérive facilitée par la méconnaissance par l'opinion publique des données factuelles sur la question. Or ces données qui sont connues des spécialistes existent bel et bien. La nouveauté, c'est qu'avec l'Open Data - un mouvement qui se développe et qui vise à mettre à la disposition de tous l'immense recueil de données statistiques détenu par nos diverses administrations - on peut facilement faire sortir ces données de l'état de confidentialité dans laquelle elles se trouvaient.
Comme le rapporte régulièrement l'excellent site d'information owni.fr, voici un peu plus de six mois que la France a pris l'initiative d'ouvrir le site data.gouv.fr comme portail d'entrée de l'ensemble des données publiques. Si la mise en route de ce projet rencontre quelques bugs et difficultés de jeunesse, il faut néanmoins saluer la démarche qui répond aux exigences du décret-loi Etalab et de la circulaire correspondante en date du 26 mai 2011.
A partir de là, il est assez aisé de remonter au recensement de la population étrangère présente en France, des données de 2008 de l'INSEE qui préexistaient d'ailleurs à Etalab. Qu'y apprend-on ?
Et bien tout d'abord que les étrangers qui représentent un peu plus de 3,5 millions de personnes en France vivent majoritairement dans les grandes agglomérations - et notamment dans la région parisienne - ce qui ne devrait pas surprendre grand monde.
Ceci ne signifie pas qu'il n'y a pas d'étrangers ailleurs, et même là où on ne les attend pas forcément. Ainsi un département plutôt connoté "France profonde" comme l'Ain compte presque 50 000 étrangers et même en Gironde, a priori éloignée du bassin méditerranéen ou des frontières de l'Est, on recense plus de 50 000 étrangers. Bien évidemment, rapporté à la population nationale, ces chiffres n'ont généralement rien d’extraordinaire : Mis à part le cas bien compréhensible de la capitale (15%) - ou celui effectivement pathologique de la Seine-Saint-Denis (21%), les étrangers représentent une fraction de la population qui dépasse rarement les 10%.
C'est encore plus vrai si l'on ne s'intéresse qu'aux étrangers non communautaires, c'est-à-dire ceux qui inquiète vraiment une partie de nos concitoyens. En conservant les mêmes échelles de couleurs que précédemment, on constate un éclaircissement de la carte mais non pas une modification fondamentale de la répartition de ces populations. Autrement dit, qu'ils soient communautaires ou non, les étrangers résident globalement aux mêmes endroits. Ceci n'exclut cependant pas des disparités régionales fortes mais sur des populations globales faibles. Ainsi les étrangers du Gers sont à 82% des étrangers communautaires - sans doute issus de la péninsule ibérique tandis que la proportion est totalement inverse dans le Doubs (77% de non communautaires) avec de gros contingents algériens, marocains et turcs.
Les données de l'Insee nous permettent d'ailleurs de jeter un regard plus détaillé sur ces trois fractions importantes de la population étrangère en France, pour lesquelles on observe des répartitions substantiellement différentes. Les quelques 472 000 Algériens présents sur le territoire national suivent globalement la ligne Paris - Lyon - Marseille (en fait plutôt dans l'autre sens) avec néanmoins d'importants contingents dans le nord du pays. On note aussi de fortes implantations en Isère, dans la Loire, en Moselle ou - plus inattendu - dans les Alpes Maritimes et en Haute-Garonne.
Répartition à peu près similaire pour les quelques 443 000 Marocains avec cependant un étalement bien plus prononcé sur la façade méditerranéenne et une implantation moins marquée en Rhône-Alpes. En outre là où les Algériens dominent en Moselle, ils sont surpassés en nombre par les Marocains dans le Bas-Rhin ainsi qu'en Gironde.
Histoire différente pour les ressortissants turcs qui sont désormais près de 223 000 sur notre territoire. Venant de l'Est, ils prédominent dans le Bas-Rhin, dans le Doubs et sont fortement implantés en Moselle, en Isère ou en Haute-Savoie. Comme les autres étrangers, ils sont aussi très nombreux en Seine-Saint-Denis. mais aussi dans le Val-dOise. Plus étonnant, ils représentent près de 4 étrangers non communautaires sur 10 dans en Corrèze ou dans la Meuse et même un étranger non communautaire sur 2 dans l'Orne. Ceci dit, il ne faut pas attribuer à ces derniers pourcentages plus d'importance qu'ils n'en ont, dans la mesure où ils portent sur des effectifs totaux très faibles.
Voici ce qu'on pouvait assez facilement dire sans se lancer dans de grandes études statistiques. A l'aide des données de l'INSEE, et du service épatant mis à disposition par drawmeagraph.com, chacun pourra d'ailleurs affiner son idée sur la question.
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