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De quelle couleur est Daniel Cohn-Bendit ?




Histoire d’un vert nuancé


Il y a quelques années, une caricature parue dans le Canard Enchaîné montrait les principales figures du mouvement écologiste français à qui on posait la question : de quelle couleur est un Vert ? Dans cette caricature, Dominique Voynet répondait « Rouge », Noël Mamère répondait « Rose », Antoine Waechter répondait « Vert-de-gris » et Brice Lalonde répondait « Prismatique ». Pour ceux qui n’auraient pas compris, ces réponses étaient censées traduire les sympathies supposées de ces leaders, respectivement pour le communisme, le socialisme, les réactionnaires et l’opportunisme !

S’il est aujourd’hui un leader vert unanimement reconnu est France, c’est bien Daniel Cohn-Bendit qui – paradoxalement – traîne d’une époque depuis longtemps révolue le surnom de Dany-le-rouge, surnom hérité d’un temps où son radicalisme supposé comme sa rousseur avérée apparaissaient de manière plus flamboyantes.


Si l’on posait aujourd’hui à l’opinion publique la question de savoir « de quelle couleur est Daniel Cohn-Bendit », j’imagine que la plupart des sondés répondraient « Vert ». C’est d’ailleurs probablement ce que répondrait aussi l’intéressé.

Mais le vert est une couleur qui rassemble bien des nuances, et peut-être même plus que les autres. C’est en quelque sorte une couleur opportuniste qui sied à ravir au personnage. Bien sûr, on ne saurait douter de la verdeur d’un personnage aussi haut en couleur que DCB mais il faut bien concéder que trop de vert tue ses vertus !

Ce que chacun sait déjà, c’est que DCB est un vert écolo, tendance vert pomme. En l’occurrence, j’ai personnellement tendance à penser que ce sont ses fans qui sont des pommes et lui, le ver qui est dans le fruit : il y a quelques années, un assistant de la délégation française des Verts au Parlement européen m’avait confié que si DCB était Vert, c’était surtout « parce que les Verts ont besoin d’un grande g… et que DCB a besoin d’être le leader quelque part » ! Ceci en dit long sur la perception du personnage et de ses convictions par ses petits copains.

Mais ce que le grand public ignore certainement c’est le soutien de DCB pour un régime ultranationaliste et militariste, un régime négationniste de surcroît, celui de l’Etat turc. Que l’ancien soixante-huitard ait des sympathies vert-de-gris, voilà de quoi surprendre. C’est qu’en vérité, s’est opéré au sein du groupe des Verts au Parlement européen une bien étrange dérive. Initialement investis dans la lutte contre le racisme, les Verts, et singulièrement les Verts des pays où vivent d’importantes communautés turques, ont fait leurs la défense des droits de ces communautés immigrées injustement soumises à des discriminations.

Cependant, par une sorte de glissement, les Verts européens sont passés de cette politique légitime de défense des ressortissants turcs en Europe à une bien plus discutable position apologétique du régime turc, parangon de démocratie comme on le sait. A lire les amendements déposés par le groupe des Verts sur les résolutions concernant la Turquie au Parlement européen, il ne faudrait jamais parler des droits des Kurdes, de l’occupation de Chypre, des innombrables manquements de la Turquie à ses engagements et surtout, surtout pas du Génocide des Arméniens. Cette ligne là, c’est aussi celle de Dany le vert-de-gris et il ne surprendra personne qu’une ressortissante turque ayant participé à la manifestation négationniste des Loups-Gris - l’équivalent turc des jeunesses hitlériennes– soit brièvement apparue à Villeurbanne comme candidate des Verts sur une liste commune avec les socialistes avant de se retirer spontanément lorsque la tête de liste – Jean-Paul Bret – s’est enquis de son opinion sur le Génocide des Arméniens.

Pour revenir à mon propos, il y a quelques jours, je croyais donc encore naïvement que DCB était quelque part entre le vert pomme et le vert-de-gris. Jusqu’à ce qu’on apprenne, à la faveur de votation suisse sur l’interdiction des minarets, que son vert était aussi celui de l’Islam politique, c’est-à-dire de l’islamisme. Nous resservant le coup de Lisbonne, DCB a en effet déclaré souhaiter que les Suisses revotent jusqu’à ce que mort s’en suive, c’est-à-dire jusqu’à ce que le résultat soit conforme à ses attentes comme à celles des mollahs. Et pour bien punir les Suisses d’être mal-pensants, DCB déclare « La plus formidable des ripostes – mais je rêve – serait que les plus riches des pays musulmans retirent leur argent des banques suisses. Vider les caisses de la Confédération: voilà ce qu'il faudrait ! Que l'Arabie saoudite ou les Emirats Arabes Unis désertent votre place financière. Voilà ce qui marcherait. On l'a bien vu avec les pressions exercées par le fisc américain dans l'affaire UBS. Si cette votation a des conséquences économiques, alors les Suisses comprendront. » Comprendront quoi ?
Personnellement, j’en tirerai trois leçons :

  • Premièrement, il existe une caste, dont DCB est un représentant caricatural, qui au fond méprise la démocratie et l’Etat de droit. Cette caste considère notamment qu’elle n’a pas de compte à rendre à la justice – confer l’affaire Polanski – que tout lui est permis, surtout ce qui est interdit aux autres – confer l’affaire Mitterrand – et que la démocratie, c’est bien seulement quand ça sert à valider les opinions qu’elle considère comme légitimes – confer l’affaire du traité de Lisbonne et celle de la votation suisse. DCB s’est d’ailleurs déclaré pour une « démocratie directe encadrée »…à quand le vote censitaire ?
  • Deuxièmement, DCB soutient non seulement le négationnisme de la Turquie mais aussi l’islamisme le plus rétrograde. On comprend mieux qu’il se sente parfaitement à l’aise avec ses coreligionnaires de l’AKP – le parti islamiste turc au pouvoir – qui finit d’opérer sa mue ottomane, synthèse parfaite de l’Islam politique et du nationalisme turc.
  • Troisièmement, le vert est décidément une couleur pleine de nuances.

Commentaires

Anonyme a dit…
Que voilà un blog militant, polémique et au final peu enrichissant! Dommage.
DCB, comme il semble commun de le nommer par écrit en le dévalorisant puisqu'il lui est ainsi refusé d'être reconnu par son patronyme, est indubitablement habité par des convictions, sans ambition électorale présidentielle ni ministérielle, et ses réflexions sont prémonitoires.
CF http://www.lemonde.fr/politique/article/2010/09/12/pourquoi-l-europe-s-enracine-a-droite_1409667_823448.html
M Cohn Bendit n'est le centre droite vendable que pour ses opposants, qui eux ont une réelle ambition ministérielle voire présidentielle.